Implications juridiques et fiscales des constructions érigées par l’usufruitier à l’expiration du droit d’usufruit

Notarius, mai-juin 2004

Une question à laquelle nous sommes souvent, directement ou indirectement, confrontés est celle relative au traitement fiscal du « transfert » de la propriété des constructions érigées par l'usufruitier au propriétaire du terrain et ce, sans contrepartie en espèce ou en nature.

De telles opérations sont en effet très fréquemment effectuées entre un dirigeant d'entreprise et «sa» société ou encore entre deux sociétés liées, l'une opérationnelle, l'autre patrimoniale.

L'objectif du présent articulet consiste à dégager très succinctement les principales conséquences de cette situation en droit civil et en matière d'impôts directs eu égard à ces deux hypothèses.

1. Les aspects juridiques.

1. 1. Propriété des constructions.

Pendant toute la durée de l'usufruit, l'usufruitier est et demeure - sauf clause contraire - propriétai­re des constructions qu'il érige sans qu'il soit nécessaire de préciser dans l'acte constitutif d'usu­fruit que le nu-propriétaire renonce à l'accession au profit de l'usufruitier. En ce sens, un tel acte constitue par lui- même une preuve permettant de renverser la présomption contenue dans l'article 553 du Code civil.

En effet, selon le Professeur Hansenne (Voy. J. HANSENNE, L'accession, Rép.Not. T.II livre I, Larcier, Bruxelles, pp.90 et suivantes), l'usufruitier est titulaire d'un droit de superficie-conséquence soumis aux dispositions applicables au droit d'usufruit et suit, en tous points le sort de ce droit , sans que soient applicables les dispositions établies par la loi du 10 janvier 1824 réglementant le droit de superficie et notamment la règle impérative relative à la durée maximum de 50 ans prévue à l'article 6 (Voy. J. HANSENNE, Les biens, Ed. Collection scientifique de la Faculté de Droit de Liège, 1996, pp.1248 et 1249 et A. VAN MUYLDER et J. V ERSTAPPEN, Problèmes actuels relatifs au droit d'accession, à la renonciation de ce droit et au droit de superficie, R.G.E.N. n°2 4156, p. 374).

Ce droit de superficie accessoire est opposable aux tiers sans autre formalité que la transcription de l'acte de constitution de droit d'usufruit lui- même.

1.2. Indemnisation des constructions.

L'article 599 du Code civil précise que l'usufruitier ne peut à la cessation réclamer aucune indemnité pour les améliorations qu'il a faites encore que la chose soumise à son droit en soit augmentée.

La Cour de Cassation et la majorité de la Doctrine considèrent que le terme amélioration ne peut être étend u à toutes les constructions qui respecte nt la substance de la chose, e.g. un terrain à bâtir, et certainement pas à de nouveaux bâti ment s érigés dont la valeur dépasse largement le montant des revenus de l'usufruit.

C'est vers le droit commun qu'il convient de se tourner pour dégager les principes généraux en matière d'indemnisation de telles constructions partant du postulat qu'à terme, le nu-propriétaire entendra conserver les bâtiments érigés par l'usufruitier.

A cet égard, il existe deux tendances que nous nous contenterons d'évoquer. La première veut que l'article 555 du Code civil s'applique et qu'en l'espèce, les bâtiments érigés par l' usufruitier soient qualifiés de travaux susceptibles d'enlèvement, cette disposition prévoyant au demeurant que le nu-propriétaire qui décide de conserver de tels bâtiments doit rembourser à l' usufruitier la valeur des matériaux et le prix de la main d'œuvre sans égard à la plus ou moins grande valeur que le fonds a pu recevoir.

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