Van Elder & Associates
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« Un Code au secours de certains héritiers » : l’Echo du 8 novembre 2008 ;

A la stupéfaction de la chute des cours, s’ajoute, pour certains héritiers, l’incrédulité face aux prescriptions du Code des droits de succession à l’occasion de l’établissement de la déclaration de succession de leur auteur.  

Certains héritiers se voient contraints de payer des droits au taux progressif le plus élevé alors que les titres qui leurs sont transmis sont considérablement dépréciés.

Comment s’explique cette discordance entre valeur à déclarer et taxation corrélative par rapport à la valeur des mêmes actions tombant, in fine, dans le patrimoine des héritiers ?

Que déclarer ?

 La valeur vénale.

Le principe contenu dans le Code des droits de succession veut que les titres et valeurs que le défunt possédait soient évalués au jour de son décès à leur valeur vénale. 

La valeur vénale peut être définie comme celle que l’on peut escompter dans le cadre d’une vente ayant fait l’objet d’une publicité adéquate permettant de réunir un nombre suffisant d’amateurs.

Relevons que les conditions de vente doivent être normales et non optimales et que les amateurs doivent représenter les différentes tendances du marché.       

Les caractéristiques objectives du titre influenceront également sa valeur vénale.

Le Ministre des Finances, a précisé à cet égard que les prix obtenus lors d'une vente publique, de même que les cours, au jour du décès, dans une bourse étrangère, constituent une base fiable reflétant normalement la valeur vénale du titre .

Gageons que pour les titres qui ne sont pas cotés ou dont la cotation n’est pas représentative, l’évaluation de leur valeur vénale n’est pas aisée à la lumière des nombreux critères de valorisation d’entreprise alors qu’une insuffisance d’estimation relevée par l’Administration fiscale vient encore augmenter la charge successorale des héritiers.

Le Code des droits de succession offre la possibilité aux contribuables de trancher la question en amont du dépôt de la déclaration par le biais de la procédure dite d’expertise préalable. Celle-ci consiste succinctement à désigner de concert avec l’Administration un expert dont les conclusions lieront contribuables et autorités fiscales.

L’intérêt de cette mesure est relatif vu qu’elle est limitée aux titres émis par une société dont le siège se trouve sur le territoire belge .  Dans les autres cas, il importera de disposer d’arguments permettant d’emporter la conviction du Receveur ou des experts désignés dans le cadre de la procédure de contrôle applicable à certains titres.      

 Le prix courant. 

Pour les effets publics cotés à l’une des bourses du Royaume, le Code des droits de succession impose aux  héritiers de déterminer leur valeur imposable par référence au prix courant.

Le prix courant est constitué de la moyenne des cours pratiqués le mois précédent précise l’article 6 de l’Arrêté Royal du 31/03/1936.

La publication du prix courant s’effectue au plus tard le vingt de chaque mois au Moniteur belge.

A quel moment ?

Pour les titres ne faisant pas l’objet d’une publication au prix courant, c’est la valeur vénale au jour du décès qui est à déclarer.

Une question se pose, laquelle peut avoir une importance considérable - les jours de krach par exemple - pour des titres qui, à l’ouverture de la bourse affichaient une valeur habituelle pour perdre, au fil de la journée, un grand nombre de points et atteindre à la clôture une cotation historiquement faible : celle de l’heure à laquelle il faut se référer.

Le Code des droits de succession n’apporte aucune précision sur ce point.

Il nous semble dès lors que le contribuable conserve toute liberté quant au choix de l’heure à laquelle il doit déclarer ses valeurs et partant, de la cotation afférente au titre qu’il est amené à déclarer. 

Quant aux bénéficiaires de titres cotés au prix courant, ils peuvent choisir de se référer au prix courant de l’un des trois mois qui suit celui du décès étant entendu que le choix du mois opéré s’applique à l’ensemble des valeurs. 

A défaut d’avoir fait état de ce choix de manière expresse dans la déclaration de succession, le prix courant à employer est celui du mois qui suit celui du décès.

Deux titres, deux mesures…

La possibilité de choisir le prix courant publié au cours du trimestre consécutif au décès peut constituer une réelle opportunité pour les titulaires d’effets publics cotés à l’une des bourses belges. Il importe de faire une application adéquate du Code des droits de succession afin d’optimiser la déclaration de succession et particulièrement en cette période trouble.   

Opportunité, d’une part, car le prix courant n’est qu’une moyenne des cours du mois précédent, ce qui permet de diluer les effets d’une hausse de cours ponctuelle advenue sur une courte période voire le jour du décès. 

D’autre part, parce que ces mêmes héritiers ont la possibilité de faire correspondre la base imposable avec le prix de réalisation des titres et ce faisant, disposent corrélativement de la garantie de ne payer un impôt supérieur - voire de payer un montant inférieur - à l’accroissement effectif de leur patrimoine dès lors que la réalisation des titres intervient à bref délai. 

Si le jour du décès la valeur des titres était de 100 et que cette valeur fut constante, voire inférieure, au cours du mois endéans lequel le décès s’est produit et que dans les deux mois qui suivent, les mêmes titres sont vendus pour 200 les héritiers pourront en toute légalité les déclarer pour 100.  

Ces héritiers n’auront pas à souffrir d’une chute brutale de cours se produisant suite à un événement intervenu à bref délai après le décès tel une faillite ou un krach, par comparaison aux autres actionnaires obligés de déclarer et de subir une imposition lourde sur des titres qui ont perdu toute valeur. 

Cette différence est d’autant plus frappante aujourd’hui lorsque l’on songe, par exemple, à la situation des héritiers d’actions Fortis ou Dexia comparativement à celle d’héritiers d’actions Lheman Brothers, au vu des importants droits de succession que ces derniers vont devoir supporter sur des titres devenus sans valeur au surlendemain d’un décès intervenu après le dépôt de bilan de la banque américaine .  

L’absence d’objectivité de cette distinction entre actionnaires, permettant aux uns - contrairement aux autres - de tirer avantage d’événements affaiblissant ou renforçant le titre à déclarer, intervenus antérieurement ou postérieurement au décès heurte le sacro-saint principe de non-discrimination et peut-être également celui de la libre circulation des capitaux qui transcendent notre système juridique.